L’Hommage à François Bovesse 2023 – Le discours de Françoise Vanheule, membre du CCW

Le discours de Françoise Vanheule, membre du CCW, lors de l’Hommage à François Bovesse du dimanche 5 février dernier

La parole est donnée à …..

Françoise Vanheule, en tant que  membre du CCW, fille et petit fille de résistants mais surtout en tant que «  passeuse de mémoire ». Durant toute sa carrière dans l’enseignement communal de Namur, comme prof de moral puis directrice, elle n’a eu cesse d’inculquer à ses élèves des valeurs comme la démocratie, la liberté, la tolérance. En 2005 elle a créé un spectacle «  Wallons toujours, si François Bovesse m’était conté » avec une classe de 6ème primaire de Velaine à la Maison de la Culture de Namur. Partager ces valeurs propres à François Bovesse, avec les enfants, reste à ses yeux, un atout majeur pour construire un avenir de qualité.

Discours. 5/2/2023

François, je me permets de te tutoyer, tu l’aurais certainement voulu.

Je m’adresse à toi directement car j’ai l’impression que tu es toujours là. Ce lieu qui est le tien, est tissé de murmures, de filets de voix, la tienne.

J’ai l’impression que ta silhouette puissante va surgir pour aller te promener le long de l’eau avec Juliette, ta tendre épouse, que tu es assis à ton bureau en train de lire un poème ou de composer un discours qui a l’art de galvaniser tous ceux qui l’entendent.

Ô Sambre suspends ton vol

Et près des flots chéris que tu aimais embellir

François,

ton esprit nous hante

Ô temps suspends ton cours

Laisse-nous savourer ton souvenir

Tes actes, ton verbe magnifique, toi l’homme d’une ville, d’un fleuve, amoureux de la vie, de la terre, gamin glorieux de Namur.

Le 1 février 1944, tout se déroule si vite…

3 détonations, ton corps chancelle, titube, s’affaise, ils t’ont supprimé.

 Les traîtres, tes assassins, ils ont eu peur pour l’avenir du pays et pour cause….Dès l’occupation, tu affiches haut et fort ton idéal démocratique «  ne pas se résigner, ne pas plier ». Tu combats les mensonges et les hypocrisies des collaborateurs par ton coup de plume dans un journal clandestin «  La Belgique nouvelle ».Tes sentiments sont nets et connus de tous, l’ennemi tu l’affrontes au nom de ton peuple.

Surveillé, provoqué, humilié, arrêté, emprisonné, pris en otage, rien ne t’arrête et tu travailles, tu lis ,tu écris, tu puises tes forces dans la nature mosane.

 Que n’as-tu pas fait François pour t’opposer à la tyrannie ? En rapport avec l’armée secrète, avec le gouvernement belge de Londres, tu as osé te lever contre la bête immonde. Menacé en raison de ton image publique de résistant civil et par tes activités secrètes, tu refuses de quitter la patrie. La suite, on la connaît !

Non François, ils ne t’ont pas eu, ils n’ont pas compris que c’était mission impossible que de te faire disparaître. 79 ans après, tu arrives toujours à nous rassembler et le frisson de la reconnaissance nous parcourt inexorablement.

L’actualité te rattrape François. En lisant la une d’aujourd’hui, tu te serais insurgé contre toutes ces injustices infligées à des innocents. Guerre en Ukraine, un peuple qui se bat désespérément ;des réfugiés toujours et encore ; un travailleur humanitaire condamné à 40 ans de prison et 74 coups de fouet ; des journalistes pris en otage à cause de leur liberté d’expression ou tués à cause de leurs coups de crayon ; des attentats terroristes dans un métro, un aéroport. Des hommes et des femmes bannis à cause de leurs cris de protestations, d’enseigner la réalité, de leur besoin de s’instruire, d’un code vestimentaire, d’une manifestation, d’un choix de vote, d’idéaux interdits.

«  L’homme est condamné à être libre » selon Sartre. Alors comme toi, François, l’homme se rebelle. Tu aurais aimé l’engagement de ceux et celles qui prônent des droits et qui veulent éliminer toute forme de discrimination.

Gandhi, Mandela, Martin Luther King, Simone Veil , des noms célèbres parmi tant d’autres que tu aurais admirés.

Et tous ces jeunes anonymes qui osent s’insurger….

Balance ton corps, balance tes idées, tu les aurais soutenus …

Ton emprunte nous donne des ailes pour aller de l’avant. Tu as vu juste en  1935 en visant l’éducation des jeunes «  ce qu’il nous faut ce sont des sources, des pommiers vivants et capables de donner de beaux fruits ».

Apprenons vite à nos enfants à devenir des citoyens responsables. Apprenons-leur à penser par eux-mêmes, à se forger des opinions, à oser dire oui ou non. Qu’ils aient la soif de connaître, de comprendre la société, de distinguer et de se servir des différences pour bien vivre ensemble.

Nos enfants, qu’ils soient curieux de tout ici et ailleurs pour s’ouvrir au monde.

« Rendre sa place à l’esprit », tu avais raison, François.

En guise de conclusion, un message d’espoir que tu aurais écouté avec conviction.

 

Extrait de «  Derrière le brouillard » de Grand Corps malade.

Comme à chaque chute à chaque fois

Ça s’est imposé à toi

Chanter comme un enfant surpris

Comme un instinct de survie

Comme un instant de furie.

Chanter pour accepter, exprimer, résister, avancer, progresser, exister.

Chanter comme une résilience, une délivrance, une évidence !

Chantons François, chantons le temps des cerises, chantons l’amour du monde !

Que les couleurs, les croyances, les mots, les idées, les tendances, les genres, les passions se mélangent.

Et que chaque instant si éphémère soit-il, tisse des liens, construise des ponts et détruise les murs de l’extrémisme.

François tu nous as convaincus, cultivons la gaillarde de la liberté pour que ton œuvre nous guide à «  vivre simplement heureux ».

 A toi nosse Francwès.

F. Vanheule.